Les enfants de Yuki, après deux ans d’université au Manitoba, ont chacun à leur tour, à trois ans d'intervalle, consacré une année entière à étudier le japonais à l’Université Tokai au Japon et à s’entraîner avec son réputé club de judo, les deux, de façon intensive. Nous vous présentons les écrits combinés de leur journal de bord respectif, lesquels seront émaillés de notes rétrospectives et d’échanges sur leur expérience.
16 décembre 2011
S’intégrer au club de judo de Tokai
L'entraînement de judo d'aujourd'hui était très important. À partir d'aujourd'hui, je fais maintenant partie de l'équipe de judo de Tokai.
Normalement, lorsque nous nous inclinons au début et à la fin de la pratique, les gaikokujin (étrangers) sont placés séparément des
étudiants de Tokai. Les étudiants forment une ligne et les étrangers s'assoient perpendiculairement aux étudiants. Cependant, aujourd'hui, l'un des professeurs m'a dit qu'à partir de maintenant, je devais m'asseoir parmi les étudiants de Tokai. Je peux m'asseoir avec les étudiants de deuxième année. J’en suis honorée. Ce n'est pas facile d'entrer dans le cercle restreint du club de judo. Mon père m'avait prévenu que je pourrais toujours être considérée comme étant à part des étudiants même si je suis le même régime. Mais maintenant, j'ai fait un pas de plus vers l’intégration dans l'équipe.
C'est vraiment utile que j'apprenne le japonais. Chaque jour, je peux parler et comprendre davantage. Par rapport aux autres étrangers qui viennent pratiquer, je peux interagir avec les filles du club. Nous discutons après l'entraînement ou je leur apprends à faire des sauts de main arrière. Lentement mais sûrement, un sentiment de camaraderie s'est formé entre nous. Elles ne me disent peut-être pas tout et je ne comprends pas encore tout, mais elles me considèrent comme leur amie et coéquipière.
19 décembre 2011
Yakiniku¹
Samedi, les membres de l’équipe féminine de judo se sont rendues dans un restaurant où l’on sert du yakiniku à Mitaka, à Tokyo. Apparemment, c'est quelque chose qu'elles font chaque année, comme une sorte de fête de fin d'année. Les entraîneurs prononcent quelques mots de motivation, les gérants de l'équipe disent aussi quelques mots, et puis... on mange! Et c'était gratuit parce que le gérant de l'équipe a tout payé. Ainsi, les assiettes de viande n'arrêtaient pas de venir à notre table, l'une après l'autre.
Pour ceux qui ne savent pas ce qu'est le yakiniku, yaki signifie grillé et niku signifie viande. Nous étions environ trois personnes par table et au centre de chaque table il y a une sorte de grille qui recouvre un feu. C’est à nous de cuisiner la viande crue qu’on nous sert. C'était délicieux. Mais je n'ai jamais mangé autant de viande en si peu de temps. Hi hi! Je pense que j'ai mangé ma ration de viande pour une semaine entière!
Assiette de viande : joli, n’est-ce pas?
Photo de groupe
(Désolée, mais je ne vais pas nommer tout le monde.)
Les étudiants de première année qui accueillent
des convives au restaurant.
¹ Yakiniku est une méthode japonaise de cuisson des viandes et des légumes au charbon de bois, au gaz ou sur une plaque chauffante. (Source : Wikipédia)
Karaoké et coupe de cheveux au Japon
Hier, trois amies et moi sommes allés à Hon-Atsugi pour une soirée karaoké. Je pense que nous avons chanté pendant environ deux heures. J'ai enfin chanté ma première chanson en japonais. Mais j'ai bien peur que ce ne soit pas vraiment une chanson récente... C'est une chanson que j’écoutais dans la voiture quand mon père nous conduisait à Winnipeg, mon frère et moi, pour nos entraînements de judo. Et sans vouloir insulter les goûts musicaux de mon père (car je pense qu'il a beaucoup de goût), mais les Japonais de mon âge n'en avait jamais entendu parler. Je vais devoir apprendre quelques chansons plus récentes. C'est quelque chose que je n'ai pas encore fait, me plonger dans la culture pop. On m'a donné quelques noms d'artistes populaires, mais je n'ai pas encore eu le temps de les chercher sur Internet.
Zara (à gauche) et Kaya
Après le karaoké, Natsumi et moi sommes allés dans un salon de coiffure pour nous faire couper les cheveux. C'était très différent comparativement à ceux au Canada.
D’abord, parce que nous étions de nouveaux clients, nous avons dû remplir un formulaire sur l’historique de nos cheveux. Avez-vous déjà coloré vos cheveux? À quelle fréquence visitez-vous un salon de coiffure? Ensuite, il y avait aussi des questions sur ce que nous voulions faire à nos cheveux ce jour-là. Quel genre de coupe voulez-vous? Aimeriez-vous recevoir des conseils de votre coiffeur? Et puis, plus précisément, quel genre de coiffeur aimerions-nous avoir pour notre coupe de cheveux? Voulez-vous un coiffeur qui fait le travail rapidement? Quelqu'un de très compétent? Préférez-vous quelqu'un qui parle beaucoup ou quelqu'un qui travaille silencieusement? C'était un peu… trop! Hi hi! Je n'ai pas l'habitude de répondre à tant de questions. Dans un sens, je pense que c'est une bonne idée. Cela permet de créer une meilleure relation entre le coiffeur et le client. J'ai eu ma part de coiffeurs et il y a eu des moments où nous ne cliquions tout simplement pas ou je n'aimais pas la méthode du coiffeur. Donc je trouve ça utile. Et c’est conforme à la culture japonaise de vouloir satisfaire les besoins du client.
Et je suis contente de ma coupe. Je voulais les avoir un peu plus courts, rendre ma chevelure plus légère, tout en gardant un peu de longueur pour pouvoir attacher mes cheveux en queue de cheval pour le judo. Après la coupe, on m'a même fait un petit traitement capillaire, un léger massage du cou et des épaules, et ils m'ont lissé les cheveux. C'était beaucoup plus cher que ce que j'ai l'habitude de payer au Canada. Au Canada, dans ma petite ville, vous pouvez vous faire couper les cheveux pour la modique somme de 10 à 15 $. Mais je pense que les 35 $ que j'ai payés hier en valaient la peine.
Natsumi
9 décembre 2014
Premier... pour la première fois
Hier, notre équipe a eu un autre entraînement de courses de vitesse à l’université. Si vous vous souvenez, la dernière fois, j'avais fait une forte impression en étant l'un des premiers à terminer les courses de vitesse. Et apparemment, cette impression ne s'est pas estompée.
Cette fois, le sempai responsable de la course a pris les quatre coureurs les plus lents de nous tous et en a fait les capitaines des équipes de relais. Je n'avais jamais fait ça, mais je voyais bien qu'il allait y avoir un peu de compétition. Mais ce qui m'a vraiment pris au dépourvu, c'est que, lorsque le moment est venu pour le premier capitaine de faire son choix, le premier nom qu'il a dit était « Shiokawa! ». Je peux dire que tout le monde était aussi surpris que moi par leur « OOoooohhhhh... ». Certains ont même dit des choses comme « Saisho gaijin da ne! » ce qui signifie « Il a choisi l'étranger en premier! »
Ce n'était pas vraiment important, mais c’était quelque chose qui comptait beaucoup pour moi. Lentement, je commence à faire bonne impression dans le club. Je fais partie de l'équipe comme un coéquipier normal, ce qui était l'un de mes objectifs avant de venir ici. Ce genre de chose m'aide à garder ma motivation et ouais, m'a fait sourire, je suppose.
Le 16 décembre 2014
Pratique au Kōdōkan²
Après le Grand Chelem de Tokyo, il y a eu un camp au Kōdōkan (lieu de naissance du judo), et le samedi, tous les membres du club devaient au moins participer à cet entraînement. Les autres jours, si vous étiez libre, on vous demandait d'y aller, mais comme j'ai des cours tous les jours, ce samedi était le seul jour où j'ai pu y aller.
Nous sommes tous arrivés à la gare à peu près à la même heure, à 7 h, et après avoir pris un petit déjeuner au combini³, nous avons pris le train pour Kourakuen. Une fois là-bas, nous n'avons marché quelques pâtés de maisons et sommes arrivés au Kōdōkan. J'y étais déjà allé avec mon père il y a trois ans, mais je ne me souvenais pas vraiment du bâtiment. Nous étions les premiers là-bas, bien sûr, et donc nous avions le vestiaire uniquement pour nous, les cent quelques d'entre nous, ha ha. Après cela, nous avons grimpé six séries d'escaliers pour finalement arriver au dojo. Nous nous sommes assis en attendant que l'entraînement commence.
Bientôt, d'autres judokas de différents pays ont commencé à se présenter, y compris des athlètes du Canada. Une fois l'entraînement commencé, je me suis aligné avec l'équipe de Tokai, ce qui était bizarre, mais comme j'étais venu avec l'équipe, j'avais l'impression que c'était le seul endroit où je devais aller. Habituellement, à l'entraînement, je m'assois sur le côté.
L'entraînement s'est bien passé. Mon entraîneur, Agemizu sensei m'a demandé si ma blessure guérissait bien et m'a ensuite dit de faire attention. J'ai pu m'entraîner avec quelques autres gars de différents pays et des Japonais de différentes régions du Japon. Je ne les ai pas vraiment tous battus, mais je me sentais un peu plus en contrôle par rapport aux entraînements à Tokai. Ce serait bien de pouvoir pratiquer plus souvent avec ces personnes, mais bon.
De gauche à droite : Fubuki, moi et Masaya, quelques-uns de mes
meilleurs amis parmi mes coéquipiers.
Après la pratique, je suis allé saluer les coéquipiers canadiens. L'entraînement des filles était le suivant et certaines des filles canadiennes étaient également venues. Je parlais à un ami proche lorsque l'équipe de Tokai a été rappelée pour une petite réunion. Ça fait du bien de faire partie du groupe même si c'est peut-être juste dans ma tête.
Après cette réunion, nous avons été autorisés à quitter le lieu et à faire ce que nous voulions. J'avais l'intention de rentrer directement chez moi quand j'ai été invité à aller faire du magasinage avec des gars du judo. Nous sommes allés dans quelques magasins de vêtements de sport et j'étais vraiment tenté d'acheter un sac imperméable. Ici au Japon, ce serait très utile, comme je l'ai remarqué, la pluie ici tombe quand bon lui chante, ha ha.
Nous avons mangé des pâtes assez dispendieuses, mais qui étaient bonnes, avons eu quelques petites discussions sur des choses ordinaires autres que le judo, ce qui était bien, pour faire changement. Je suis reparti chez moi en ayant un peu plus d'espoir pour le futur.
Shinjuku, Tokyo
² Kōdōkan : littéralement « École pour étude de la voie ». (Source : Wikipédia)
³ Combini : Genre de dépanneur