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Les travaux d’été (suite)

À la fin de juillet, et tout le mois d’août, il fallait faire les foins. Le long des champs, le long du chemin de fer et des chemins. Tout ce qu’on pouvait ramasser, sinon il fallait en acheter de Tom Dufour. Lui le montait en meulon et il nous fallait le charroyer en traîneau avec ses racks à foin tirés par les chevaux. C’était plus facile avec les chevaux de traverser les fossés pour rejoindre les meulons de foin dans le milieu du champ. M. Dufour avait toujours du beau foin de ses champs de fumier à canard. Le foin poussait très généreusement.

Durant les journées maussades, pluvieuses, c’étaient les réparations de clôtures et aussi la coupe du bois à la scie ronde pour les mois d’hiver à venir. Si ce n’est pas fait durant ces temps perdus, il faut le faire après les récoltes d’automne et parfois, il n’y a pas assez de temps avant les grosses neiges.

La préparation du jardin exige la même attention. Les plants délicats qui poussent près des fenêtres sont transplantés dans le jardin. Déjà, les plants tels que la rhubarbe, les asperges et l’ail percent la terre par la force du soleil. Et, après une bonne journée d’ouvrage aux champs et un bon souper, ma mère nous invitait à nous reposer dans le jardin tout en piochant et en arrachant les mauvaises herbes qui cherchaient à dominer les beaux légumes fragiles en même temps.

Il fallait enlever les cannes sèches parmi les framboisiers, la paille sur les fraisiers, pour qu’ils puissent mieux respirer et produire encore une autre année. Nous cultivions des framboises, assez pour en vendre, et des fraises pour les mettre en conserve. Des arbres fruitiers longeaient la clôture de l’est du jardin. Les pommettes, surettes un peu, étaient populaires pour nous enlever la soif et réveiller nos papilles. Les grosses prunes bleues garnissaient nos poches et rendaient le trajet vers l’école moins ennuyeux les premiers jours de septembre.

Nous avions tous les légumes possibles, jusqu’aux cerises de terre. Pas question de congeler quoi que ce soit dans ce temps-là, alors il fallait faire des centaines de pots de conserve pour nos réserves. Pour les desserts, on conservait dans des pots des poirettes (Saskatoon) et aussi des bleuets de Sandyland. Quand on était tanné des petites poires, la mère nous servait des bleuets, et quand on était tanné des deux, la mère nous servait les deux ensemble. On avait du plaisir avec ça.

Comme je l’ai déjà mentionné, nous arrachions les patates pour les déposer dans la cave de terre sous la maison. Un petit coin était réservé pour les betteraves rouges, tandis que les carottes étaient entassées dans des contenants de sable fin très sec. À cette période, nous avions tout le charbon voulu pour l’hiver, alors les portes de charbon étaient étendues sur les patates, ce qui permettait d’avoir de la place pour disposer de quatre à cinq douzaines de choux, queue en l’air, pour permettre à l’eau qu’ils contenaient de sortir. Ils pouvaient ainsi se conserver très longtemps.

Au jour le jour, c’était une autre paire de manches. En se levant, en été, il fallait traire les vaches et il ne fallait surtout pas être en retard. Quelques minutes seulement et tu avais des grandes oreilles tournées vers toi, accompagnées de beuglements et de grincements de dents. Souvent, c’était la mère qui entreprenait cette tâche pour en même temps voir sa vache, ou bien c’était Fleurette qui y allait pour en même temps faire le reste du train avec Fernand. Les autres filles étaient dans la maison à faire les besognes journalières, les lits, le ménage en haut et en bas, les repas, la vaisselle. Le lavage du linge était réservé pour le lundi, et les vendredis, c’était une bonne fournée de pain. Après l’école le vendredi, nous partions à la course pour arriver à la maison. Car le premier arrivé gagnait la croûte pour se faire une tartine à la crème (épaisse) recouverte de sucre brun. Si la crème absorbait le sucre, on y ajoutait une autre couche. Pour ne pas se la faire voler, il fallait l’asperger avec un peu de salive.

Pour ma part, j’ai été servant de messe pendant une douzaine d’années. Durant la semaine, souvent je servais les deux messes au couvent. Les dimanches et les fêtes, c’étaient les cérémonies et il fallait surtout ne pas toucher le ciboire! Aujourd’hui, je vois les jeunes manipuler ces choses à leur façon. En revenant (à la course) pour déjeuner, il fallait s’assurer qu’il y avait assez de bois pour le poêle de la cuisine, entrer de la glace pour l’eau à boire. Souvent, les poules et les poulets en demandaient eux aussi. En route pour l’école, il y avait la livraison du lait et des légumes, quand ils étaient prêts.

Venant d’une famille de douze enfants, après que nous avions fini nos travaux, nous cherchions à gagner un peu de sous. Je me souviens avec George Bouchard, à 6 ¢ de l’heure, on pouvait gagner 6 $ dans une semaine. C’est vrai qu’on n’était pas grands. C’était mieux que waterboy, après qu’on avait servi les autres, on pouvait nous aussi boire pour rien. 

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