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À l’aube de 2007, année des 18 ans d’Élianne, la vie est belle. Elle étudie en bio-écologie et se dirige en biologie marine. Elle est athlète en vélo de montagne, a un amoureux et part pour le Mali visiter son frère et sa famille... Élianne est heureuse. Jusqu’à la journée fatidique où sa vie bascule.

Les textes de cette chronique proviennent d'extraits de courriels envoyés à la famille par Jocelyne, sa maman. L’histoire d’Élianne m’a bouleversée et je voulais vous donner la chance de la lire. Pour vous faire connaître un peu Élianne, nous avons débuté cette chronique dans le numéro de mai 2017 par son voyage au Mali avec Jocelyne. Nous vous recommandons cette lecture préalable. MISE EN GARDE : certaines images et textes peuvent heurter la sensibilité des personnes non averties.

Trois ans plus tard!

15 mai 2010

BONJOUR, BONJOUR, BONJOUR,

Ça fait déjà plusieurs semaines que je veux vous écrire, vous donner des nouvelles. En fait, j'avais pensé envoyer un message pour vous souhaiter la Bonne Année... je suis donc un peu en retard!!! Comme le temps me manque pas mal, j'ai décidé de faire un journal des points forts et de vous parler de notre année par petits bouts, par petites chroniques, que vous pourrez ainsi aussi lire dans vos vies de fous et de folles à vous.
 

Samedi 8 mai 2010, 7 heures : Élianne dort encore, Fabiola (5 ans) qui est ici pour le week-end joue sagement (!) au Lego et j'en profite pour vous parler un peu avant de « m'enligner » sur le reste de ma journée. Élie voulait voir un peu sa filleule et je dois dire que je suis pas mal fière de la façon dont elle s'en occupe, beaucoup plus d'initiative, beaucoup plus de présence. Je vois un gros changement depuis la dernière fois, une autre belle évolution donc. Et je la laisse dormir, car cela demande beaucoup d'énergie de s'occuper de notre Fablabla nationale, son surnom vous en dit long sur la place qu'elle occupe dans une maison, on l'adore!

ÉTÉ 2009

Le mois de mai 2009 a marqué le début de la recherche à Québec. Je crois bien vous avoir parlé de cette recherche. Elle est effectuée par le Dʳ Cyril Schneider, neurophysiologue, professeur au département de réadaptation de l'Université Laval. Son protocole de recherche consiste en des stimulations électromagnétiques effectuées au niveau crânien ou en périphérique. Élianne participe à deux protocoles : sur la mémoire et sur le contrôle moteur. Après trois semaines de stimulations, grosses améliorations sur le plan de la mémoire épisodique (court terme), améliorations notables aussi du contrôle moteur du poignet gauche et de la cheville droite. Nous avons poursuivi nos allers-retours à Québec pendant tout l'été, sauf une pause de quelques semaines en août, et par la suite tout l'automne. Malgré la fatigue de la route, ces visites se sont transformées en petites virées entre filles puisque Martine et Marie-Christine (pour ceux qui sont nouveaux dans notre groupe, Marie-Christine, 23 ans, a eu un traumatisme crânien sévère en janvier 2007, elle et Martine, sa mère, sont devenues nos amies) étaient aussi présentes, Marie participant aussi à la recherche. Nous avons découvert Québec, je m'y oriente bien maintenant, on en a profité pour voir Renaud et Cynthia, mon amie Lucie, flâner dans le Vieux-Québec, etc. Finalement, joindre l’utile à l'agréable!!! De plus, même les séances au CHUL sont joyeuses, une belle équipe, Cyril est très sympathique et drôle, il est super avec les filles, il a une grosse influence sur elles et les jeunes qui travaillent avec lui (étudiants de maîtrise ou de doctorat en ergothérapie, physiothérapie et psychothérapie) sont tous très gentils et j'ai beaucoup appris sur le fonctionnement du cerveau.
 
Pour plus d'infos, voir l’article du Globe and Mail : « Chasing the elusive memories of Elianne Parent » par Anne McIlroy dans l'édition du 24 mars 2010. Elle a écrit cet article après une longue entrevue téléphonique avec Élianne et moi, suite à une présentation faite par Cyril à un congrès de neurosciences à Toronto. 

14 h : un autre petit bout avant d'aller me ré-enfermer dans mon bureau, première paie des employés cette semaine, donc, pas mal de paperasse en perspective.

Juin 2009, un nouveau venu dans notre famille : Christophe, fils de Yves et Charlotte, et filleul de Renaud qui en est bien fier. 

L'été 2009 a marqué aussi la fin de la canne. Sur les conseils de Cyril, Élianne l'a peu à peu délaissée et même si elle n'a pas retrouvé tout son équilibre, elle se débrouille très bien sans elle. On pensait qu'elle s'en resservirait l'hiver venu, ce ne fut pas le cas. Elle a parfois besoin d'un peu d'aide pour franchir certains obstacles. Sur terrains très accidentés, comme en forêt ou dans une grotte pendant nos vacances en République Dominicaine, elle ressort la canne, mais c'est très rare. De plus, elle prend maintenant sa douche debout au lieu d'assise sur son banc ce qui facilite beaucoup sa vie.

Grosse nouveauté : Élianne s'est procuré son vélo adapté et elle a adoré ses promenades sur le parc linéaire. Elle aime toujours autant être dehors et ce parc linéaire, qu'elle trouvait si plate avant (que voulez-vous, s'il n'y avait pas de côtes, de roches, de boues, ce n'était pas assez pour elle) est devenu son terrain de jeu préféré. Elle en a fait plusieurs fois, accompagnée bien sûr, soit par Gilbert, Serge, Ti-Gui, Vivi, et elle a pas mal d'endurance encore. Elle piaffe d'ailleurs d'impatience de s'y remettre. Et nous pensons pouvoir relever un peu les petites roues cette année.

Élianne et Renaud nous ont accompagnés dans notre périple annuel à Cape Cod, ce fut une belle occasion de se retrouver ensemble en camping, ainsi qu'avec nos amis et voisins de terrains. Pour Élianne, toutes ces sensations (vagues, costume de plongée, planche de surf) ont ramené quelques souvenirs fugaces à sa conscience, elle s'est d'ailleurs souvenue là-bas d'un incident survenu en 2006 pendant qu'on y était : le sable qui était très chaud et sur lequel elle s'était brûlée les pieds et que Nico l'avait porté sur son dos. Pour une fille sans souvenirs de son passé, c'est quelque chose de pas mal extraordinaire. Bien sûr elle ne pouvait pas courir pour se lancer dans les vagues, mais son sourire quand Renaud l'a promenée sur la planche de surf en disait long sur les sensations retrouvées. Je dois dire aussi que l'on a bien ri d'elle parce qu'elle retrouvait difficilement le chemin de notre terrain à la toilette (elle a failli aller pisser dans la tente de la voisine, une madame pas très sympa en plus) ou quand elle était perdue même dans sa tente, distinguant difficilement la porte de la fenêtre. Elle nous a tous bien impressionnés de pouvoir marcher aussi longtemps dans le sable mou de la plage, de pouvoir monter et descendre les dunes abruptes, et elle a redécouvert là-bas les joies du ping-pong de plage que nous devons maintenant pratiquer dans notre cour, elle ne bouge pas beaucoup ses jambes, mais est très habile avec la partie supérieure de son corps.

Malgré un été plus ou moins beau et chaud, Élianne a beaucoup pratiqué ses mouvements de nage dans la piscine et bien qu'elle soit toujours incapable de nager sur l'eau, elle s'est améliorée pas mal. Elle ne réussit pas à coordonner assez ses mouvements (bras-jambes) pour se maintenir à la surface, mais elle nage facilement en dessous de l'eau et peut encore profiter des joies de l'apnée, ce dont elle ne s'est pas privée en mars en République Dominicaine.

Un moment difficile pour moi en juin 2009 : la comparution de Sandra Diotte devant la Commission des libérations conditionnelles. J'avais été invitée à y présenter un texte dont je vous avais d'ailleurs mis un extrait dans mon courriel de mai 2009. Tout s'est bien passé, mais le plus impressionnant, ce fut à la prison de Joliette. Il y a eu quelques moments émouvants, tout cela faisait remonter des émotions que j'aurais aimé ne pas avoir à revivre, merci d'ailleurs à mes amis Francine, Chantal, Yves et Cécile qui étaient présents avec moi et qui m’ont donné du soutien. La libération conditionnelle a été acceptée, mais avec une condition de projet communautaire pour six mois et maintenant je suppose qu'elle est dans son six mois de libération conditionnelle ordinaire avant d'être définitivement libérée. Moment particulier : elle s'est tournée vers moi et m'a regardé en disant combien elle était désolée, ce qu'elle n'avait jamais été capable de faire au procès, me regarder! Paraîtrait-il qu'elle a beaucoup (!) cheminé et cessé toute consommation, je demeure sceptique et pourrai le croire seulement dans quelques années si cela se maintient.

Juillet 2009 : un bon spectacle, une belle rencontre, Melody Gardot, jeune chanteuse américaine, victime aussi d'un traumatisme crânien suite à un accident de vélo il y a quelques années. Elle a serré Élie très fort dans ses bras et lui a dit de ne pas lâcher, je vous mets la photo de cette rencontre même si Élianne fait dur!!!
 

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Avec Melody Gardot - juillet 2009

(suite au prochain numéro)

 

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